Séquence Poésie: la poésie de Ronsard: Contre les bûcherons de la forêt de Gastine ( cours du jeudi 3 mars)
Voir texte distribué en classe. Reprise de l'explication commencée en classe pour ceux qui n'ont pas réussi à prendre des notes correctement. Choix de ce poème pour découvrir la poésie de Ronsard en ménageant une transition avec la séquence sur l'argumentation sur le thème écologique de la relation à la nature.
Dans ce
poème, Elégie XXIV, Ronsard oscille entre ton accusateur et mélancolique lorsqu’il évoque
la destruction de la forêt de Gastine, une forêt qu’il connaît bien, habitant
juste à côté. Cependant, il apparaît d’emblée que cette élégie a une portée plus générale.
Elle est un plaidoyer en faveur du respect des forêts.
Il s’agira alors de voir comment l’écriture poétique elle-même permet le
développement d’une argumentation efficace.
1.L’adresse au bûcheron.
le
tutoiement semble d’emblée poser le peu de respect du poète envers
le bûcheron.
le poète construit une scène fictive dans laquelle le
poète ferait face au bûcheron. Il place ainsi sous les yeux du lecteur le
moment-même du sacrilège.
deux questions semblant correspondre à deux démarches différentes
- la première ressemble à un
espoir de faire prendre conscience au bûcheron de la gravité de son
geste : "ne vois-tu pas".
Mais déjà elle peut se lire comme un reproche.
- la seconde question est plus explicitement une accusation. Le bûcheron est définitivement criminel.
se développe en effet un champ lexical ( isotopie) du crime et de la justice : "sang", "Sacrilege meurtrier" , "tuer des Déesses " ; "méchant"
développement de deux champs lexicaux formant antithèse : la vie et la mort. Partant, la forêt continue d’être personnifiée.
effet hyperbolique de la référence aux déesses.
effet
d’insistance également car sur cette strophe le poète semble formuler de trois
manières un peu différentes mais proches la même idée : le meurtre d’une
entité sacrée :
1. "le sang lequel degoutte à force
Des Nymphes qui vivaient dessous la dure écorce"
2."Sacrilege meurtrier"
3. "tuer des Déesses "
Mise
en scène du châtiment divin : évocation de l’Enfer
puisque la prise de conscience n’a pas eu lieu, le poète passe à la menace
directe. Il s’agit de faire peur. Cette menace se veut d’autant plus efficace
qu’elle se fait dans une tournure d’interpellation et de suggestion. A
l’imagination de venir remplir cet espace de châtiment par les peurs qui lui
sont propres.
2.Le poète
s’adresse de nouveau à la forêt.
C’est alors l’évocation de la perte. A noter le
caractère anaphorique de la négation "plus...ne" (reprise trois fois) Répétition de la négation également au dernier vers de la strophe
"ni" "ni".
Cette perte ne désigne pas seulement la destruction de la forêt. Le poète décrit des conséquences plus amples, tout d’abord en présentant la forêt à la fois comme lieu-refuge, lieu idéal, et hôte des plus appréciables.
- l’idée de lieu-refuge et d’hôte précieux se développe à travers le champ lexical suivante : "haute maison", "sous ton ombre", "chez toi", "verte crinière". Déjà sont mises en avant des notions mélioratives.
- ce lieu-refuge abritait diverses
entités, dont la disparition est tour à tour mise en scène.
Vont disparaître les animaux, va disparaître l’humain, mais disparaîtront aussi les dieux.
A travers cette fuite des êtres, c’est la disparition d’un lieu idéal, le lieu possible de l’amour et du bonheur qui disparaît.
- Pour évoquer cette disparition
de la possibilité-même de l’amour et du bonheur, Ronsard met en scène un
topos (lieu commun, motif) littéraire et pictural : le locus amoenus
(lieu idéal, parfait) ainsi que l’image pastorale (de pasteur, le berger)
ou aussi nommée bucolique.
Les Bucoliques du poète latin Virgile mettent en effet en scène les amours de Bergers et de Bergères dans une atmosphère naturelle et joyeuse. En associant le "plus ...ne", la négation à cet imaginaire bucolique, le poète signifie bien la destruction de tout cet univers.
- Le motif bucolique se laisse
lire dans la figure du "Pasteur" qui possède bien tous les
attributs traditionnels : la flûte, "Flageolet à quatre trous
persé" , le bâton, "la houlette", berger qui évoque ses
amours avec sa bergère, la " belle Janette". ( Le mâtin à ses pieds est son chien)
- L’évocation finale des dieux Pans et Satyres, dieux associés à l’ivresse, la fête en pleine nature, la joie, les amours, vient confirmer l’élargissement de la perte. On ne coupe pas seulement un matériau, on se coupe soi-même de la source de la vie heureuse.
Alors que toutes les valeurs associées à ce qui étaient sont mélioratives, bonheur, beauté, douceur, joie, le maintenant, dans un jeu d’antithèses va être associé au négatif.
- évocation de la douleur et de la dureté. La forêt continue d’être personnifiée, étant présentée comme un être sensible "tu sentiras". Il y a bien élargissement du poète de l’évocation de l’arbre d’une forêt à toute la nature, puisque c’est maintenant le sol qui est montré comme victime.
- "haletant d’effroi"
La forêt était un microcosme, celui de l’existence heureuse, la destruction de cet endroit conduit à la désolation et à la douleur.
C’est bien
alors dans un mouvement hautement mélancolique que le poète adresse ses
dernières paroles à cet être tant aimé. ( à suivre mercredi prochain)
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